samedi 14 février 2015

Pourquoi la force militaire échoue ?

La supériorité numérique, technologique et la puissance de feu des armées modernes ne mènent forcément pas toujours à éradiquer une guérilla ou milice populaire bien inférieure sur tous les stades déjà cités .en effet l’échec de l’Otan à éradiquer les Talibans, la défaite Israélienne consécutive face au Hezbollah en 2006 ensuite face au Hamas en 2009 et 2014 sont autant d’exemples qui confirment le constat. Pourquoi les forts leur arrive-il de perdre ? et quelles sont les raisons qui permettent aux faibles de l’emporter des fois sont autant de questions qui intriguent les penseurs militaires occidentaux.  Après avoir analysé plus de 200 conflits asymétriques depuis 1800 dans son ouvrage « How the weak  Win wars » l’auteur américain Ivan Arreguin-Toft a conclu que le fort l’emporte en moyenne dans 71,5% des cas. L’analyse devient plus intéressante si on détail le chiffre et son évolution temporelle depuis 1800 jusqu’à nos jours, en effet de 1800 à 1849 le fort l’emporte à 88,2% des cas ; de 1850 à 1899 à 79,5% ; dans la 1ère partie du 20ème siècle le chiffre recule à 65,1% ensuite à 48,8% dans la période post 1950.

L’auteur tente d’expliquer le phénomène en concluant que l’interaction des stratégies suivis par le fort et le faible et le choix de la stratégie choisi face à son adversaire qui déterminent le sors du conflit, l’auteur identifie deux classes majeures de stratégies . « Stratégie directe » qui vise à détruire les capacités militaires de l’adversaire et « stratégie indirecte » qui vise à anéantir la volonté de combattre de l’ennemi et l’inciter à résigner.

On retiendra à Ivan Arreguin-Toft le mérite de prouver statistiquement le phénomène.la question n’est pas aisée puisque plusieurs facteurs peuvent mener à la victoire des uns ou à la défaite des autres.

Adrew Mack revient quant à lui à l’expérience française en Indochine suivi 20 ans après par celle des Etats-Unis au Vietnam dans « Why big nations lose small wars :the politics of asymmetric conflict ». l’auteur explique que la victoire politique des faibles n’implique pas forcément défaite militaire du fort mais plus tôt incapacité de celui-ci de justifier le coût financier et humain de son implication que cela soit aux yeux de ses troupes pour garder leur moral au haut niveau ou au yeux de son peuple dont le soutien de l’effort de guerre est déterminant. Selon l’auteur le conflit pour le faible est une question de survit alors que le fort peut jeter l’éponge à partir du moment qu’il perçoit que son projet de guerre n’est plus rentable alors pour limiter les dégâts il se retire.

Jeffrey Record s'interroge sur la question en se focalisant beaucoup plus sur la manière des Etats-Unis à penser et mener la guerre, selon lui les décideurs politiques de son pays ne considèrent pas la guerre comme instrument politique mais comme une alternative à celle-ci ,un pas de non retour qui doit forcément conduire à une victoire quelque soit le prix même si l’utilisation de la force punitive devient stérile tout en fermant les yeux sur les issues politiques pour la résolution des conflits. Pour lui la victoire militaire n’est jamais une fin en soi si elle ne conduit pas à atteindre l’objectif politique préalablement établi par le fort à ce titre l’auteur revient sur l’échec politique américain en Iraq.

Sun Tzu l’auteur de l’art de la guerre soulignait que « l’invincibilité se trouve dans la défense, et la possibilité de victoire se trouve dans l’attaque » en effet cette citation cache beaucoup de vérités qui restent réalistes jusqu’à nos jours, une relecture des 13articles de suntzu d’un œil contemporain peuvent donner explication voire prédire le sors de conflits présents et futures.

Selon SunTzu 6 paramètres peuvent mener à la victoire ou causer la défaite :

1 .La volonté de combattre dont l’intensité résulte de la cause qui sera perçue comme légitime ou illégitime que ça soit au yeux des troupes des deux antagonistes ou à l’égard de la population civile qui habite dans le territoire disputé.

Exemples de victoire du fort face au faible :victoire de l’Espagne contre l’organisation terroriste ETA, victoire de l’ANP algérienne face au GIA.
Exemples de perte du fort face au faible : la France en Indochine et en Algérie.

2. La supériorité numérique

3. La discipline qui conditionne la compétence tactique

4. Les armes ou bien la technologie utilisée par les uns et les autres : la portée des armes, mobilité et précision de tire et le rapport coût/efficacité par rapport à l’antagoniste, il ne sert à rien de gaspiller par exemple un missile de l’Iron dome Israélien à 200K USD le missile pour contrer un obus du Hamas de type Grad de 10% le prix

5. La géographie : une guérilla opère plus aisément dans un environnement montagneux (exemple : taliban,hezbollah…), une jungle tropicale(FARC, Viêt-Cong…). Par contre la guérilla est défavorable à découvert en terrain aplati désertique où il n’est pas aisé de surprendre l’ennemi (Sahara marocain cas du Polisario)

6. Le climat : généralement un territoire où il fait difficile d'opérer en hiver est toujours favorable à la guerre asymétrique (exemple : échec de Napoléon et des Nazis à envahir la Russie, le cas des Talibans en Afghanistan, le cas des Tchétchènes…)

Analyse de quelques conflits en se basant sur les 6 paramètres cités ci-dessus :

PARAMETRES

Antagonistes
La Cause
Sup.numérique
discipline
armes
géographie
climat
total
VS
Israel
0
1
1
1
0
0
3
Hezbollah
1
0
1
0
1
1
4









VS
Maroc
1
1
1
1
1
1
6
Polisario
1
0
1
0
0
0
2









VS
USA
0
1
1
1
0
0
3
Viêt-Cong
1
0
1
0
1
1
4

L’échec cuisant de l’Otan en Afghanistan qui rappel  la mésaventure de l’URSS dans le même pays 11 ans au paravent, laisse apparaître plus d’une question sur les raisons de l’échec de la force militaire face à un ennemi faible matériellement, une fois de plus la pensée militaire est amené à donner des explications tangibles et élaborer des modèles et théories qui peuvent aider les politiques à décider des guerres futures et les faire sortir de l’indécision pour pacifier les menaces urgentes que représentent certaines organisations asymétriques comme l’Etat Islamique en Iraq, Les Houtis au Yémen et Boko-Haram au Nigéria…

Bibliographie :
How theWeakWinWars, Ivan Arreguin-Toft
http://www.fd.unl.pt/docentes_docs/ma/aens_MA_20004.pdf

Why Big nations lose small wars, Andrew Mack
http://web.stanford.edu/class/polisci211z/2.2/Mack%20WP%201975%20Asymm%20Conf.pdf

Why the strong lose, Jeffrey record
http://strategicstudiesinstitute.army.mil/pubs/parameters/Articles/05winter/record.pdf


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